Après cinq années d’études et de recherches à l’École nationale supérieure d’art et de design de Nancy (Ensad Nancy) et diplômée en 2020 en art, Manon Nicolay développe un travail sculptural et dessiné qui expérimente la matière, sa masse et sa résistance. Ses sculptures et installations, entre tenue et effondrement, sont comme suspendues dans l’instant où tout chavire.
Inspirée par les matériaux de construction et de l’industrie automobile, ses pièces sont viscéralement ancrées dans le réel. Évoquant parfois des situations de violence, les matériaux accidentés, tordus, brisés semblent dialoguer entre eux et s’opposer en même temps qu’ils se complètent.
Aujourd’hui, ses recherches se portent dans la manière dont le temps participe à son travail plastique. Les matériaux, comme des fers à béton tordus, des carrosseries de voitures accidentées, des pare-brises peints et brisés, etc… se contraignent et se maintiennent mutuellement. Le verre feuilleté se transforme ainsi en un drapé brisé, comme calciné et dont les éclats se détachent peu à peu.
Performatives, ses pièces se déploient comme des corps non-humain, dialoguant avec l’espace. Les matières qui les composent se transforment et se dégradent, leur lien évolue au fur-et-à mesure du temps d’exposition. Elles proposent des masses organiques, des formes linéaires -en tant que figure graphique, ou dessin dans l’espace- contractées ou au contraire déployées, jouant pleinement une dialectique avec l’espace qui l’accueille.
En 2021, Manon Nicolay a participé à plusieurs expositions collectives : Triennale Jeune Création (Casino Luxembourg et Rotondes) ; Les jours meilleurs (Galerie Poirel, Nancy) ; Semaine de l’art contemporain (Artopie, Meisenthal) ; Biennale d’art contemporain (Motoco, Mulhouse), … Cette même année, elle a été lauréate de la Bourse Horizon (Artagon, Marseille) ainsi que de la Bourse Traversées (Réseau Diagonal, Marseille). Cette seconde bourse lui a également permis de bénéficier d’un texte de Lydie Marchi, directrice du Centre d’art contemporain Châteauvert, dans la revue lacritique.org :
« Les sculptures de Manon Nicolay sont des silhouettes. Silhouettes fragiles. Silhouettes graciles. Enfin, c’est ce que l’on croit si on les regarde sans grande attention. Un peu rapidement. Approchez-vous et vous verrez que cette tige fait au bas mot 50 kilos. Que ce morceau de pare-brise dont elle se sert comme d’une feuille de papier doit en peser une vingtaine. Mais, il est là, comme suspendu à un fil. Mettant à mal les lois de la pesanteur. C’est cela le travail de Manon Nicolay, mais pas que. C’est un formidable travail d’artisan. Artisan dans le sens où la maîtrise technique lui permet d’expérimenter des formes nouvelles et de mettre à mal les barrières qui pourraient exister entre dessin et sculpture. On ne dira pas que ces sculptures sont du dessin en 3D. Ce serait ne pas rendre grâce à ce travail qui justement a une grâce infinie. Manon Nicolay développe par ailleurs un travail graphique où le trait va à l’essentiel sans fioritures. Dans une construction de l’espace presque silencieuse. Un travail qui n’a rien à envier à la force de ces sculptures. Ces dernières sont d’ailleurs presque crasseuses. Constituées de matériaux récupérés, ramassés sur le bord des routes, glanés ici et là. On regarde un peu mieux, et on se dit que quand même on est à Nancy, et qu’il y a ici comme un hommage à l’industrie de la région Lorraine par l’utilisation de verre securit de provenance industrielle dans ces sculptures élancées réalisées à la limite physique de la matière. Jusqu’à ce que cela casse. Si la palette de couleurs est resserrée, c’est qu’il s’agit d’aller à l’essentiel. Ne pas s’éparpiller. Chacune de ces sculptures est une architecture, une cathédrale qui ne dit pas son nom. Tandis que ces dessins semblent s’être échappés prêt à s’envoler de par la légèreté infinie des traits qui les constituent… »